Sommes-nous condamnés à réélire un Mitterrand ou à cloner un Sarkozy ?
Les sondages, les médias, les observateurs tentent de nous en persuader. Comme si l’élection du président n’était qu’un « duel » quinquennal. Comme si la démocratie était binaire et non pas plurielle. Comme si nous avions tout à attendre de deux commis d’office d’une Ve République minée par la bipolarisation UMP-PS, le rythme échevelé du quinquennat, l’atonie du Premier ministre, la frénésie législative, la régence de l’administration par les petits marquis élyséens.
Mais « tout baigne », rassurons-nous, le « match » sera télévisé ! Arrière les écolos, les populos, les centraux, les accros des réseaux sociaux, tous les indignés qui parasitent le bon vieux duopole ! Arrière la planète bousculée, l’Europe en cendres, les collectivités territoriales aux abois : place aux duettistes.
Et pourtant, qui veut croire en effet que M. Hollande peut donner encore envie de faire crédit à « socialisme » ou « mitterrandisme » ? Et M. Sarkory, sur l’autre rive du désarroi, à « libéralisme » ou « gaullisme » ? Est-il raisonnable de nous laisser croire que l’État-Nation, l’État-Providence, le « roman national », le « rassemblement du peuple français », « l’appel au peuple », l’Europe même, résisteront à l’offensive mondiale des financiers et des experts, au harcèlement de la crise à toute heure, à la bousculade des événements, à la fébrilité généralisée ?
Nos deux ténors n’avancent pas, à cette heure, de projet assez ambitieux qui réponde à ces questions. Tous deux ont un problème avec la longue durée, la temporalité, l’échéancier, la prospective. L’un mitonne à feu doux et distribue déjà les places, l’autre fricasse à tout hasard. Or, Histoire en marche voudrait qu’on prépare la France à une autre cuisine, avec d’autres chefs de rang. Et d’abord avec François Bayrou qui, lui, n’est pas dupe de l’activisme bipolarisé et qui nous propose d’élaborer ensemble un vrai projet salvateur.
Jean-Pierre Rioux